Aujourd'hui, nous sommes très fatigués. Le soir, nous avons beaucoup de mal à nous endormir avant 2h et nous nous obligeons à nous lever le matin. Ces derniers jours, nous avons beaucoup marché, nous avons des douleurs aux pieds, aux jambes (après 8h de piétinement et de marche quotidienne, c'est normal) et chaque jour est pire que la veille. Il ne nous reste que quelques jour pour en profiter donc, allez, on prend sur nous !
Nous allons à Akihabara, quartier aussi connu sous le nom de "Electronic Town".
Pour nous rendre dans ce quartier, nous prenons la Yamanote, ligne de métro circulaire qui fait le tour du centre de la ville. Le calme, le wagon qui oscille... il ne faut pas qu'on dorme... la petite musique à chaque station...allez, tiens encore 25 min et on y est... la voix douce qui annonce les arrêts et les correspondances... on s'est endormis tous les deux jusqu'à ce que j'ai un léger spasme : "Tsugi wa Akihabara, Akihabara desu. O deguchi wa migi gawa desu. The next station is Akihabara. The doors on the right side will open". Je secoue le bras d'Alex. Nous nous levons et sortons du wagon pour nous retrouver encore à moitié endormis sur le quai où nous suivons tant bien que mal le flot des usagers.
Dès notre arrivée, nous comprenons le surnom donné au quartier : depuis la rue, nous entendons la musique assourdissante des boutiques, il y a des écrans partout diffusent des clips musicaux, des bandes-annonces d'anime (dessins-animés japonais), des magasins d'ampoules, de composants électroniques, d'électroménager, de jeux vidéo...
Mais avant toute chose, nous cherchons un endroit pour manger et nous réveiller un peu. Resto de poisson, non... boulettes, non... nouilles au poisson, non... ça je sais même pas ce que c'est... Au détour d'une rue, nous tombons sur un Becker's, une enseigne qui propose des hamburgers faits maison, ce n'est pas vraiment ce dont nous avons envie, mais là, nous ne sommes pas d'humeur à tester quoi que ce soit. Nous prenons des frites fraîches (vraiment bonnes) et deux sandwiches, un au poulet pané et l'autre au boeuf et ail. C'était assez bon, on sentait le goût de chaque ingrédient et la fraîcheur ne faisait aucun doute, le seul bémol : les portions sont un peu petites.
Nourris et réveillés, nous partons à la découverte du quartier. La première boutique dans laquelle nous rentrons propose beaucoup de figurines de personnages manga et anime, souvent des filles aux longues jambes, poitrines (trop) avantageuses et robes très courtes. Des T-shirts avec le même genre de personnages, des coussins, des posters... bon on change d'étage. A l'étage supérieur, il n'y a que des maquettes de robots Gundam, nous faisons un tour rapide et montons. Nous découvrons un étage entier consacré aux répliques d'armes à feu de guerre, je me sens assez mal à l'aise d'être entouré par tout ça, je ne suis même pas sûre que ce soit des faux. Nous montons encore pour découvrir un étage consacré aux maquettes de trains électriques et tout ce qu'il faut pour faire un paysage autour. Le dernier étage est un stand de tir. Nous prenons l'ascenseur et redescendons.
Dans la boutique suivante, encore des figurines, des jeux vidéo en japonais, des mangas avec des filles pas très habillées... des mangas pornos en fait. Bon je sors de là...
Dans la boutique suivante, nous trouvons de l'électroménager : des lisseurs à cheveux, des cuiseurs de riz, des cadres photos numériques... tout est au même prix que chez nous (à 20€ près, ça ne vaut pas le coup). Le Japon a politique de protection de la production nationale et ce constat se fait pour nous au niveau des consoles de jeu. On trouve facilement des consoles et jeux nintendo et playstation, par contre, il est exceptionnel de tomber sur des jeux Xbox.
Dans la boutique suivante, encore des figurines... nous n'aimons pas spécialement les mangas, du coup nous n'en connaissons pas vraiment. Mais les mangas, c'est comme la musique, si on regarde des émissions de télé sur la culture Japon, on en connaît forcément, au même titre qu'on peut connaître un chanteur parce qu'il a du succès sans avoir écouté ses chansons. Du coup, on cherche un peu ce qu'on connaît, et ce qui est étonnant, c'est que ce qui marche en France est introuvable ici : peu de Death Note, Black Butler, Bleach... un peu de Naruto et de One pièce.
Boutique suivante : jeux vidéos, mangas pornos... les deux se côtoient, il n'y a pas vraiment de délimitations dans la boutique du coup on regarde les jeux puis trois pas plus loin, on se retrouve devant une couverture de manga représentant une fille à la poitrine démesurée...
Magasin suivant : jeux vidéo, jeux vidéo, porno, porno... Nous sortons. "Regarde de l'autre côté de la rue, un magasin de déguisements, il y a peut être des cosplay..". Nous traversons, entrons dans la boutique... des perruques, des petites robes, des sous vêtements... ah ben non, c'est pas des cosplay. Un couple de personnes âgées regarde les sextoys, c'en est presque mignon... Bon, c'est bon, je veux sortir d'ici.
Dans la rue, partout, nous croisons des maids qui distribuent des tracts pour attirer des clients. Les maids sont des jeunes femmes en uniforme de domestiques qui travaillent dans des maid cafés. "Les services de base qui y sont offerts sont les mêmes que dans les cafés traditionnels, auxquels il faut ajouter diverses interactions avec les maids, telles que la prise de photo ou divers jeux et animation. Bien que l'image de la maid ait une forte connotation sexuelle, il n'y a aucun échange sexuel entre les maids et les clients. Un code de conduite est souvent rédigé pour réprimander certains comportements déplacés de la part des clients." (merci Wikip)
Nous entrons ensuite dans une librairie de mangas, normaux, enfin ! Ah non, il y a encore du porno au fond (c'est pas vraiment au fond en fait, ça serait plutôt à droite puisque ça fait la moitié du magasin)... Bon on va rester du côté normal. On tombe sur le rayon consacré aux livres sur les jeux vidéo. On cherche des Artbooks de Final Fantasy (un artbook, est un recueil d'images artistiques consacré à un film, un jeu vidéo, un dessin-animé... C'est ce qui constitue le support de base de création). C'est à ce moment là que le fait de ne pas comprendre le japonais a été le plus frustrant car nous ne comprenions rien à ce qui était écrit sur les tranches des livres. Même si certaines étaient en romaji, on se dit toujours qu'on passe à côté de quelque chose qui aurait pu nous intéresser...
La nuit tombe et nous laissons cet Akihabara assourdissant pour rentrer se reposer.
Jusqu'à présent, c'est le quartier que nous avons le moins aimé parce que c'était toujours la même chose : figurine de perso qu'on ne connaît pas, des jeux auxquels on ne peut pas jouer, pornos, musique trop forte... mais malgré ça, c'est celui qui nous a le plus appris sur les moeurs japonaises.
Depuis que nous sommes ici, nous tâchons de respecter la pudeur des Tokyoïte. Par conséquent, nous ne nous donnons que très rarement la main, nous nous embrassons peu en public. Ici, les gens n'ont pas de contacts physiques dans la vie courante : on ne se fait pas la bise, on ne se serre pas la main, on ne se touche pas, on ne se regarde pas dans les yeux... Le contact physique ne semble pas être le fort des japonais. On avait vu dans un reportage que les gens, ne se touchant jamais, ont du mal à rencontrer quelqu'un, se mettre en couple... et du coup restent célibataires plus tard que chez nous.
Aujourd'hui, on a découvert la réalité de cette fracture : Shibuya, c'est le quartier de la mode, des accessoires... un quartier de filles, Akihabara, c'est le quartier des jeux vidéo et des mangas pornos... un quartier de garçons (nous avons croisé très peu de filles).
Ici, il est tout à fait normal d'avoir ce genre de lectures, personne ne se cache. Un détail qui en dit long : en France, le marché des sextoys favorise plutôt les jeux amoureux, en couple, alors qu'ici, ils sont plutôt destinés aux personnes seules.
En regardant les anime, les mangas, les personnages de jeux... on voyait des filles avec des jupes très courtes et on se disait que les japonais sont obsédés.
Maintenant que nous sommes là, nous comprenons : les filles dans la rue ont vraiment des jupes très courtes (80% des filles) et elles ne font pas aborder, elles n'ont pas peur de se faire lourdement draguer, siffler ou agresser. Elles ne sont pas vulgaires, on dirait qu'elles ne cherchent même pas à être attirantes.
Maintenant que nous sommes là, nous comprenons que ces filles dessinées en jupes trop courtes ne sortent pas de l'imagination de japonais obsédés mais ressemblent plus à un exutoire pour hommes frustrés.
A Kabukichô, près de notre quartier, on trouve pas mal de "love hotel", des hôtels où se retrouvent les couples (la plupart, légitimes) pour avoir un moment d'intimité en dehors de chez eux (oui, ils payent pour ça) car en règle générale, dans les habitats traditionnels, toute la famille vit sous le même toit et dort dans la même pièce. Bonjour l'intimité !
On entend souvent à la télé que le Japon est un pays vieillissant, que les japonais ne font pas d'enfants, que le pays est en pleine chute démographique... Aujourd'hui on a compris pourquoi : c'est un pays où les gens sont émotionnellement refoulés. Une fois qu'on a compris ça, on a compris beaucoup de choses.
Commentaires